dimanche 6 juin 2010

[Billet] Merci maman.

Aujourd'hui, je me suis rendu chez mes parents pour leur rendre visite. Il y a de ça une semaine à peu près ma mère m'a dit qu'elle avait un bouquin dont elle pensait qu'il pourrait m'intéresser. Elle me l'a donc remis aujourd'hui.

Cela s'annonce bien, le livre est totalement noir et s'appelle "Gouverner par le chaos", un concept très en vogue dans les milieux conspi que je chérie tant. On y apprend tellement il faut dire. En réalité, c'est un concept maçonnique, l'Ordo ab chaos
On en entend donc beaucoup parler. Cela peut aussi rappeler le concept de la Stratégie du choc de Naomie Klein, qui a fait tant de bruit, et que je n'ai malheureusement pas encore lu !

Quoiqu'il en soit, ce bouquin est intrigant, je me penche donc dessus toute l'après midi. Je l'ai presque fini, mais je fais tout de même une pause pour écrire certaines choses que j'y ai lu.

En effet, ayant une bande de collègues complètement déjantés sur FaceBook, dont le hobby le plus habituel est de rechercher de l'information gênante, des dessous du pouvoir, et de la société en général, je me suis senti obligé de partager avec eux certaines choses que j'ai vu dans le livre de Max Milo. Et du coup, je partage aussi avec vous ..


Le livre
Comment devenir les maîtres du monde ? En centralisant l'ordre et le pouvoir autour d'une minorité et en semant te désordre dans le peuple, ramené au niveau de pantins paniqués.
La méthode ? L'ingénierie sociale : infiltration des esprits, analyse de nos moindres faits et gestes, contrôle des comportements à distance, marketing de l'intime et autres réjouissances qui font de nous de bons consommateurs. Ce texte prolonge l'essai politique insurrectionnel signé du Comité invisible et attribué aux inculpés dans l'affaire de Tarnac. Publié d'abord sur le web et y ayant suscité enthousiasme débridé ou agacement hystérique (Le Nouvel Observateur), il a été pour cette édition revu et corrigé par les auteurs.
Volontairement anonymes, ceux-ci prônent une résistance constructive : " Créer, c'est résister. Résister, c'est créer. " (1)
Commentaire personnel : Ce livre est en fait une succession, une liste, de toutes les techniques de manipulation mises en oeuvre par le pouvoir ou simplement encore au stade de recherches expérimentales.
On y retrouve donc un chapitre sur la stratégie du choc, le story telling, le Mind Kontrolle (dont parle aussi Naomie Klein) créé au temps de l'Allemagne nazie puis exporté aux états-unis.
En bref, c'est un grand abécédaire des techniques de ce que l'on nomme désormais l'ingénierie sociale.
Très instructif, mais ce que j'ai préféré, et que je vais maintenant vous faire partager, ce sont les notes en bas de page :)

(1) Gouverner par le Chaos - Ingénierie sociale et Mondialisation, Max Milo (http://www.decitre.fr/livres/Gouverner-par-le-chaos.aspx/9782353410743)


Warren Buffet et la guerre des classes

La première que je croise (page 17) est une citation bien connue de Warren Buffet (1), qui traine sur le web depuis quelques temps, mais dont je n'avais pas jamais spécialement recherché de source :
"Il y a une guerre des classes, c'est sur. Mais c'est ma classe, la classe des riches, qui fait la guerre, et nous sommes en train de la gagner !"
J'adore cette citation, parce qu'elle montre bien qu'il y a des antagonismes énormes entre les différentes catégories sociales qui existent : les riches aussi ont quelque chose a gagner dans la guerre des classes, que l'on voit souvent comme "des pauvres qui font chier les riches pour avoir un peu plus".
On se rend compte en réalité que les riches, eux aussi, ont intérêt à gagner cette guerre, ce qui veut dire en termes clairs : "Ruiner un peu plus les pauvres pour être encore plus riches" (si l'on inverse la logique précédemment évoquée).
Donc je suis assez content, vu que je n'avais jamais eu la source de cette citation, et bien elle provient d'un article du New York Times, le 26 novembre 2006, qui est d'ailleurs assez intéressant, car en le lisant on a presque l'impression que Buffet regrette cette guerre des classes, lui qui se plaint du fait qu'il paye moins d'impôts en proportion que ses secrétaires. (2)

(2) L'Article du New York Times (In Class Warfare, guess who is winning) : http://www.nytimes.com/2006/11/26/business/yourmoney/26every.html?_r=1


Le ministère de l'éducation nationale fait de l'espionnage

Alors ça c'est vraiment pas mal !

En gros, le ministère de l'éducation nationale (ainsi que le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche), en 2008, a lancé un appel d'offre (1), dont le but n'était rien d'autre que la surveillance (veille) des opinions exprimées par les Français.
Ce qui en soit, n'est pas forcément immoral, si l'on imagine que le gouvernement regarde les avis des gens et y trouve par exemple de bonnes idées, en extrait des envies, des opinions et des suggestions intéressantes.
Cela pourrait même renforcer la démocratie ..
Sauf que, quand on lit les objectifs de cet appel d'offre, on se sent forcément pris en ôtage. La manière, le ton, les mots choisis expliquent clairement une surveillance plutôt "sournoise" que réellement constructive :
Le dispositif de veille en question vise, en particulier sur Internet, à :
􀂃 Identifier les thèmes stratégiques (pérennes, prévisibles ou émergents)
􀂃 Identifier et analyser les sources stratégiques ou structurant l’opinion
􀂃 Repérer les leaders d’opinion, les lanceurs d’alerte et analyser leur potentiel d’influence et leur capacité à se constituer en réseau
􀂃 Décrypter les sources des débats et leurs modes de propagation
􀂃 Repérer les informations signifiantes (en particulier les signaux faibles)
􀂃 Suivre les informations signifiantes dans le temps
􀂃 Relever des indicateurs quantitatifs (volume des contributions, nombre de commentaires, audience, etc.)
􀂃 Rapprocher ces informations et les interpréter
􀂃 Anticiper et évaluer les risques de contagion et de crise
􀂃 Alerter et préconiser en conséquence
Les informations signifiantes pertinentes sont celles qui préfigurent un débat, un « risque opinion » potentiel, une crise ou tout temps fort à venir dans lesquels les ministères se trouveraient impliqués.
[...]
Clé de voûte du dispositif de veille, le passage en « mode alerte » visera à transmettre systématiquement les informations stratégiques ou les signaux faibles susceptibles de monter de manière inhabituellement accélérée.
Les notes de veille pourront porter ou sur l’ensemble des canaux (média traditionnels et Internet formel et informel) ou être limitées à l’internet (cf. liste des produits au bordereau des prix).
Les vidéos, pétitions en ligne, appels à démission, doivent être suivis avec une attention particulière et signalées en temps réel.
Des éléments quantitatifs (nombre d’interventions, nombre de commentaires, mots les plus fréquemment cités) seront systématiquement inclus. L’audience et l’influence des sources et des relais seront précisées.
J'adore ! Merci Maman !

Et vous savez quoi ? Mes chers contribuables, c'est vous qui payez, et pas peu.

L'appel d'offre comprend les montants à débourser : 100 000€ pour le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, 120 000€ pour le ministère de l'éducation (pour l'année 2009).
Et oui, il faut bien les payer tout ces gens qui vont scruter le web pour y déceler les risques de crises et de propagations d'informations gênantes. Donc quand on vous dira "rigueur", répondez que l'hyper surveillance ça coute bien plus cher que des soins gratuits prodigués à la société et une police décente dont les effectifs ne sont pas sans arrêt en déclin, et dont la seule politique se réduit aujourd'hui à faire du chiffre .. ou du fric, c'est comme on veut.

(1) Document PDF de l'appel d'offre du Ministère de l'éducation nationale : http://www.fabula.org/actualites/documents/26772.pdf


Renaud Dutreil et la Réforme de l'Etat

A la page 30, je tombe sur une citation de Renaud Dutreil (1), qui au moment de dire ces quelques phrases, était ministre de la Fonction Publique. Ces propos ont été rapportés dans un article du journal Charlie Hebdo (2). Le 20 octobre 2004, dans le cadre d'un déjeuner-débat de la Fondation-Concorde (3) sur le thème : "Comment insuffler le changement", il va donc donner son avis sur les structures sociales et gouvernementales qui existent en France :
C'est sur l'Éducation nationale que doit peser l'effort principal de réduction des effectifs de la fonction publique. Sur le 1,2 million de fonctionnaires de l'Éducation nationale, 800 000 sont des enseignants.
Licencier dans les back office de l'Éducation nationale, c'est facile, on sait comment faire, avec Éric Woerth [secrétaire d'État à la Réforme de l'État] : on prend un cabinet de conseil et on change les process de travail, on supprime quelques missions. Mais pour les enseignants, c'est plus délicat. Il faudra faire un grand audit. [...]
Le problème que nous avons en France, c'est que les gens sont contents des services publics. L'hôpital fonctionne bien, l'école fonctionne bien, la police fonctionne bien. Alors il faut tenir un discours, expliquer que nous sommes à deux doigts d'une crise majeure - c'est ce que fait très bien Michel Camdessus -, mais sans paniquer les gens, car à ce moment-là, ils se recroquevillent comme des tortues.
Magnifique.

(2) Charlie Hebdo : Réforme de l'état, Renaud Dutreil se lache ! (http://filinfo.joueb.com/news/reforme-de-l-etat-renaud-dutreil-se-lache)
(3) La Fondation Condorde (qualifiée de Think Tank ultra-libéral par Charlie Hebdo, mais je sais pas vraiment ce qu'il vaut ..) : http://www.fondationconcorde.com/


L'OCDE nous explique comment faire ça en douceur ...

On continue notre aventure, je passe sur la citation d'un membre du MEDEF qui explique au journal Challenge que le but de la présidence actuelle est de défaire le modèle social Français qui est "un pur produit du Conseil National de la Résistance" : Il explique que toutes les réformes faites dans des domaines complètement hétéroclites (un peu sur les régimes spéciaux, un peu sur la délinquence, un peu sur l'éducation, un peu sur les heures sup' etc etc.) forment en fait un ensemble cohérent destiné à un seul but : "Défaire méthodiquement le programme du CNR" (page 31).

J'arrive à la page 49. Et là (pour un mec comme moi) c'est comme trouver un beau bijou, posé là, qui attend que je le prenne dans la paume chaleureuse de ma main : Un rapport de l'OCDE. 

Alors pour bien faire faut voir aussi ce qu'est l'OCDE (1):
C'est une organisation internationale qui est chargée de réfléchir à des moyens de porter la croissance dans les économies de l'Ouest (en gros). Elle est la nouvelle forme de l'OECE (Organisation Européenne de Coopération Economique), et son but est d'encourager le commerce mondial, et de faciliter les échanges et l'homogénéisation des différents marchés, et des différentes gouvernances économiques.
C'est peut-être un a-priori, mais le peu des rapports que j'ai pu lire et qui émanaient de l'OCDE m'ont fait dire que c'était tout de même une organisation très libérale. Sur les retraites, sur les charges et la protection sociale, elle a toujours été là pour encourager à la casse.
Attention, l'OCDE est tout de même un organe très intéressant et très pratique, car il donne beaucoup d'indices sur le fonctionnement de l'économie, notamment des statistiques, qui permettent d'étoffer vos raisonnements etc. Donc pas forcément à jeter.
De plus, il est important de regarder un peu ses conclusions, car à n'en point douter, c'est un organe très influent en occident duquel beaucoup d'orientations politiques sont tirées par nos dirigeants.

Maintenant qu'on sait que les rapports de l'OCDE sont très "écoutés" (ou plutôt lus, pris en compte) par les dirigeants occidentaux, voyons ce que cette organisation nous dit dans un rapport daté de 1996 et appelé : "La faisabilité politique de l'ajustement" (2). On y trouve, page 30 du rapport, dans la partie "Les mesures de stabilisation peu dangereuses" :
Après cette description des mesures risquées, on peut, à l’inverse, recommander de nombreuses mesures qui ne créent aucune difficulté politique.
Pour réduire le déficit budgétaire, une réduction très importante des investissements publics ou une diminution des dépenses de fonctionnement ne comportent pas de risque politique. Si l’on diminue les dépenses de fonctionnement, il faut veiller à ne pas diminuer la quantité de service, quitte à ce que la qualité baisse.
On peut réduire, par exemple, les crédits de fonctionnement aux écoles ou aux universités, mais il serait dangereux de restreindre le nombre d’élèves ou d’étudiants. Les familles réagiront violemment à un refus d’inscription de leurs enfants, mais non à une baisse graduelle de la qualité de l’enseignement et l’école peut progressivement et ponctuellement obtenir une contribution des familles, ou supprimer telle activité. Cela se fait au coup par coup, dans une école mais non dans l’établissement voisin, de telle sorte que l’on évite un mécontentement général de la population.

Heureusement, l'auteur nous informe dans la suite du rapport que ce n'est qu'un exemple de procédure d'ajustement, et que ce passage ne saurait être pris comme l'approbation de la part de l'OCDE de ce genre de méthodes.

Mais c'est quand même magique je trouve.

(2) Cahier de politique économique n°13, Centre de développement de l'OCDE, La faisabilité politique de l'ajustementhttp://www.cip-idf.org/IMG/pdf/ocde_n_13_.pdf


Un morceau de phrase qui fait rire ..

J'en ai fini avec les notes de bas de page du livre de Max Milo. Un projet dont il parle et dont il ne donne aucune source informative est Paperclip. Bien connu des milieux conspi lui aussi. Voulant me rappeler quel était exactement ce projet, je me suis rendu sur Wikipédia (c'est un réflexe, pas forcément bon, mais enfin .. ça mange pas de pain !). J'ai pu y lire :
Originellement appelée Opération Overcast, l’Opération Paperclip fut menée à la fin de la Seconde Guerre mondiale par l'état-major des armées des États-Unis, à l'insu du Président Roosevelt, afin d'exfiltrer et de recruter près de 1 500 scientifiques allemands issus du complexe militaro-industriel allemand pour lutter contre l'URSS et récupérer les armes secrètes du Troisième Reich. Ces scientifiques effectuèrent des recherches dans divers domaines, notamment sur les armes chimiques (Zyklon B), sur l'usage des psychotropes1, sur la conquête spatiale, sur les missiles balistiques et sur les armes à longue portée (bombes volantes V1 et V2).
Loin de les affecter à des postes subalternes, le Département de la Défense des États-Unis leur confia la direction de ses programmes de recherches. Ils furent affectés aux bases de White Sands, dans le Nouveau-Mexique, et à Fort Bliss, au Texas. Grâce en partie à l'aide de ces scientifiques, l'avancée technologique des États-Unis fut considérable pendant la guerre froide.
Ce que j'ai trouvé particulièrement savoureux c'est le petit morceau de phrase "à l'insu du Président Roosevelt" .. Faudra recouper avec le discours de Ford ou je ne sais plus quel président US qui prévenait à la télévision d'une prise de pouvoir par le complexe militaro-industriel .. On le voit bien en effet. 

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